Unorthodox est un bijou dans le paysage des séries sorties en ce début d’année 2020. La mini-série en quatre épisodes raconte la rupture d’une jeune femme de dix-neuf ans avec son milieu de naissance. Et pas n’importe lequel : celui des Satmar, communauté juive ultra-orthodoxe de Brooklyn.

Portée à l’écran par la très prometteuse Shira Haas, Esther est mariée depuis plusieurs mois avec Yanky, un homme qui lui a été imposé. À l’étroit dans sa nouvelle vie de femme au foyer, elle décidera donc de fuir pour gagner Berlin, où habite sa mère qu’elle connaît très peu. Et bien sûr, de nombreux obstacles viendront lui barrer la route :

  • un nouvel environnement à appréhender ;
  • une nouvelle langue à apprivoiser ;
  • une nouvelle sociabilité à mettre en place ;
  • un nouvel avenir à choisir ;
  • une communauté à sa recherche

Première série populaire à se plonger dans l’univers des Juifs ultra-orthodoxes, Unorthodox est une série poignante. Et ce qui la rend si belle, c’est probablement que l’équipe de la série a également dû se confronter à beaucoup de ces obstacles, qu’elle a surmontés avec brio.

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Adapter une histoire vraie : le défi scénaristique

Unorthodox est une adaptation du témoignage écrit de Deborah Feldman, publié en 2012 : Unorthodox: The Scandalous Rejection of My Hasidic Roots. Elle y raconte comment elle a rompu avec la communauté ultra-orthodoxe dans laquelle elle est née et a grandi.

Pourquoi est-ce un défi ? Parce que les créatrices de cette série, Alexa Karolinski et Anna Winger, abordent l’histoire de cette rupture avec un regard extérieur. Et quels que soient les textes, les témoignages et les discussions qu’elles ont pu rassembler, elles ne pourront jamais saisir tous les aspects des situations relatées.

Dans les différentes interviews que Deborah Feldman a accordées à l’occasion de la sortie de la série Netflix, elle parle notamment de divergences de perceptions quant à la construction de l’emprise et la qualification de son départ de cette communauté.

Elle insiste notamment sur les termes utilisés : ce qu’elle a fait était une rupture, pas une fuite. Contrairement à ce qu’elle a souvent entendu, elle n’était pas en prison. De plus, elle conteste la qualification patriarcale de la communauté hassidique, ou du moins la culpabilisation exclusive des hommes dans les souffrances qu’elle a pu vivre : elle raconte que la plupart des choses qu’on lui a imposées l’ont été par des femmes.

Difficile donc de concilier ces différents regards dans la construction d’une œuvre inspirée d’une histoire vraie, mais qui n’a pas vocation à y être fidèle en tous points. C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles les passages totalement inspirés du témoignage de Deborah Feldman sont ceux de la vie d’Esther dans la communauté Satmar, et la fiction commence lorsqu’elle en sort. La “vie d’après” d’Esther Shapiro n’a rien à voir avec celle de Deborah Feldman.

Construire Brooklyn à Berlin : le défi technique

Le tournage de la série a également été confronté à des défis techniques de taille. Le plus grand d’entre eux ? Celui des décors. La série se déroule en effet à cheval entre Brooklyn et Berlin, mais le tournage s’est déroulé exclusivement en Allemagne. Il a donc fallu trouver des solutions pour rendre l’illusion parfaite !

L’équipe d’Unorthodox a donc joué avec les décors, les costumes et les angles de caméra pour recréer le quartier Satmar de Brooklyn dans les rues berlinoises. Les scènes en intérieur ont par conséquent souvent été privilégiées – jusqu’à représenter 95% des scènes supposées se passer à New York. Une contrainte qui a notamment mis au défi le directeur de la photographie Wolfgang Thaler, pour que les scènes semblent tout de même authentiques !

unorthodox brooklyn berlin
Source : Flixnews

Mais la problématique du décor n’a pas été le seul défi technique à relever lors du tournage d’Unorthodox. Il a également fallu apprendre le yiddish aux nombreux acteurs du casting ! Cette mission a été assurée par Eli Rosen, qui incarne d’ailleurs le rabbin dans la série. Traducteur et spécialiste de la culture yiddish, celui-ci a en effet été chargé de veiller à l’authenticité culturelle de la série. Il a également fallu trouver des solutions pour certains éléments de costumes – et notamment le schtreimel, chapeau cylindrique traditionnel des hommes Juifs ultra-orthodoxes.

Le saviez-vous ?

Un seul schtreimel coûte environ 1 000 $, car chaque unité requiert la fourrure de plusieurs visons. La solution trouvée pour Unorthodox : faire confectionner des chapeaux en fausse fourrure, tout simplement… et veiller à les entretenir afin que ceux-ci semblent les plus authentiques possibles.

Montrer une communauté religieuse radicale : le défi culturel

Les raisons pour lesquelles la communauté juive ultra-orthodoxe a peu été montrée dans la culture populaire sont multiples. Il y a la complexité historique, il y a les enjeux politiques, il y a son hermétisme qui rend difficile à appréhender son fonctionnement et ses coutumes, il y a la facilité à tomber dans les clichés. Or, le but d’Unorthodox était d’aller au-delà de ces clichés et de l’imaginaire collectif pour parvenir à montrer un cliché fidèle de cette culture : sans détour, sans concession, sans jugement.

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Source : Cosmopolitan

La série permet d’apercevoir les motivations de ce mouvement religieux empreint d’un passé traumatique : c’est une communauté à jamais endeuillée, qui érige en principe la mission de repeupler la Terre des six millions de vies Juives ôtées durant la Shoah. Une communauté qui estime que l’holocauste était une punition divine pour avoir tenté de s’assimiler avec les autres confessions – et refusant donc catégoriquement de participer à toute forme d’intégration avec des personnes non-juives. Une communauté vouée toute entière la communion avec Dieu, proscrivant tout ce qui pourrait les en détourner – dont les tentations du monde moderne.

Bien qu’Unorthodox raconte l’histoire d’une rupture, elle parvient à montrer sans jugement la réalité du quotidien dans la communauté Satmar. Il y a des scènes d’amour, il y a des scènes de joie, il y a des scènes de tristesse, des scènes de joie et de célébration. Il y a la fresque d’un quotidien très différent et pourtant si proche des autres cultures.

Une série à ne pas manquer

Comment l’arrivée d’Esther à Berlin va-t-elle se passer ? Quelles rencontres va-t-elle faire ? Que va-t-elle y faire pour gagner sa vie, elle qui n’a pas fait d’études puisqu’elle était destinée à remplir une fonction de femme au foyer ? Nous ne pouvons que vous conseiller de regarder cette série pour le découvrir ! Elle est disponible ici pour les abonnés Netflix.

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Source : Numero

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